Hypertrophie ventriculaire gauche et son électrocardiogramme
L'hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) correspond à une augmentation de la taille des cellules myocardiques (et non de leur nombre) en réponse, dans la plupart des cas, à une augmentation du travail cardiaque.
Cette augmentation de la taille des myocytes provoque une augmentation de la masse musculaire du ventricule gauche et peut aller jusqu'à provoquer un élargissement de ce dernier sans qu'il existe une quelconque dilatation de la cavité gauche, bien que les deux altérations (hypertrophie et dilatation ventriculaire gauche) puissent coexister.
L'hypertrophie ventriculaire gauche, en particulier chez les patients souffrant d'hypertension artérielle, augmente le risque de développer la insuffisance cardiaque, la cardiopathie ischémique, la mort subite, la fibrillation auriculaire et l'ictus.
L'électrocardiogramme n'a pas la sensibilité ni la spécificité de l'échocardiogramme, lequel constitue la méthode de référence. En revanche, sa plus grande disponibilité en fait un des principaux outils sur lesquels les médecins s'appuient dans le diagnostic de l'hypertrophie ventriculaire gauche 1.
Causes de l'hypertrophie ventriculaire gauche
La principale cause d'hypertrophie ventriculaire gauche est l'adaptation du myocarde à une surcharge de pression dans le ventricule gauche. L'hypertension artérielle en est la cause la plus fréquente. Mais, la sténose aortique ou la coarctation de l'aorte provoquent de l'HVG d'après le même fonctionnement.
La myocardiopathie hypertrophique est une maladie congénitale qui donne lieu à de l'hypertrophie ventriculaire gauche, en particulier du septum interventriculaire chez les jeunes patients ne présentant pas de surcharge de pression.
Elle se transforme généralement en HVG sévère et peut présenter de graves complications telles que l'occlusion de la chambre de chasse du ventricule gauche, une cardiopathie ischémique ou des arythmies ventriculaires.
D'autres causes à l'origine de l'hypertrophie ventriculaire gauche : l'obésité (seule ou associée à une HTA), la communication interventriculaire, l'insuffisance mitrale ou encore l'insuffisance aortique 2 3.
Hypertrophie ventriculaire gauche et électrocardiogramme
Lorsque la masse musculaire du ventricule gauche augmente, l’onde R voit son voltage croître sur les dérivations précordiales gauches (V5-V6) et l’onde S devient profonde sur les dérivations précordiales droites (V1-V2).
La durée du complexe QRS s’allonge également (plus de 100 ms) et la déflexion intrinsécoïde augmente (plus de 50 ms).
Hypertrophie ventriculaire gauche:
Ondes R hautes sur V5-V6 et ondes S profondes sur V1-V2, léger allongement du QRS, dépression du segment ST sur les dérivations inférieures, D1 et V5-V6.
En outre, on observe un rythme ectopique auriculaire, sauf dans le premier et l'avant-dernier battement (ondes P négatives sur les dérivations inférieures et le intervalle PR est court).
Il est fréquent de trouver des altérations lors de la repolarisation : on peut par exemple observer une dépression du segment ST et des ondes T négatives sur les dérivations latérales (D1, aVL et V5- V6). Cette dépression du segment ST est asymétrique : légèrement descendante dans sa phase initiale, suivie d’une onde T négative et, pour finir, dans sa phase finale, ascendante et rapide.
Une telle dépression du segment ST peut être observée chez des patients souffrant de cardiopathie ischémique ou d’intoxication digitalique.
L’axe du cœur peut se situer dans des valeurs normales (entre 0° et -30°) ou être dévié à gauche.
Certains patients peuvent même présenter un bloc de branche gauche.
On peut observer des signes de hypertrophie auriculaire gauche associée à des ondes P larges (ondes P mitrale) sur les dérivations inférieures et précordiales gauches. On peut également constater une prédominance de la portion négative de l’onde P sur V1 2.
Hypertrophie Ventriculaire Gauche et ECG
- Onde R haute sur V5-V6 et onde S profonde sur V1 et V2.
- Complexe QRS >100 ms et déflexion intrinsécoïde >50 ms, ou bloc de branche gauche.
- Dépression du segment ST et onde T négative sur les dérivations latérales.
- Axe du cœur normal ou dévié à gauche.
- Onde P large ou prédominance de la portion négative sur V1.
Indices électrocardiographiques d’hypertrophie ventriculaire gauche
Il existe plusieurs méthodes pour diagnostiquer l’hypertrophie ventriculaire gauche. La plupart d’entre elles présentent une grande spécificité mais une faible sensibilité.
Ces indices ne sont valides qu’en l’absence de Bloc de branche.
Indice de Sokolow-Lyon
C’est le plus connu et sans doute le plus simple à mettre en application.
Il consiste à mesurer la profondeur de l’onde S sur la dérivation V1, puis à l’ajouter à l’onde R de la dérivation V5 ou V6 (celle qui a le plus fort voltage des deux). On décèlera une HVG si la somme des deux est supérieure à 35mm.
Il a une spécificité d’environ 95% mais une faible sensibilité. Il peut induire en erreur chez les patients jeunes et minces.
Indice de voltage de Cornell
On l’obtient en additionnant l’onde R de la dérivation aVL avec l’onde S de la dérivation V3. Le diagnostic d’HVG sera positif si le résultat est supérieur à 20 mm chez les femmes et 28 mm chez les hommes.
Il a une sensibilité d’environ 40% et une spécificité d’environ 92%. Sa sensibilité augmente s’il est couplé à l’indice de Sokolow-Lyon.
Score de Romhilt-Estes
Bien que plus complexe à utiliser que les précédents indices, elle présente un plus grand degré de spécificité et de sensibilité.
Elle mesure chacune des altérations que peut provoquer l’hypertrophie ventriculaire gauche sur l’électrocardiogramme et leur attribue des points. On décèlera une HVG si le résultat est supérieur ou égal à 5 points. On soupçonnera fortement une HVG s’il est égal à 4 4.
Vous pouvez vous servir de le score Romhilt-Estes que nous mettons à votre disposition sur notre site web.
Indice de Peguero-Lo Presti
En 2017, Peguero, Lo Presti et al. ont proposé un nouvel indice électrocardiographique dans le diagnostic de l'hypertrophie ventriculaire gauche prenant en considération les altérations dynamiques du voltage apparaissant sur l'ECG.
Les chercheurs ont démontré que la somme de l'amplitude de l'onde S la plus profonde de n'importe quelle dérivation (SD) et de l'onde S sur V4 (SV4) offre une plus grande sensibilité en matière de diagnostic par électrocardiographe de l'HVG par rapport aux autres indices existants 5.
Dans le cas où SD se trouve sur la dérivation V4, on double l'amplitude de l'onde S pour obtenir la valeur de SD + SV4.
Un indice SD + SV4 ≥2.3 mV chez les femmes et ≥2.8 mV chez les hommes est considéré comme révélateur d'une HVG.
Cet indice n'efface pas les restrictions des indices précédents chez les patients ayant un pacemaker ventriculaire ou souffrant de blocs de branche, d'hypertrophie ventriculaire droite concomittante ou d'autres cardiomyopathies 5.
Hypertrophie ventriculaire gauche et les blocs de branches
Il va de soi que les patients souffrant d'hypertrophie ventriculaire gauche peuvent également souffrir de blocs de branches. Il est plus fréquent même de déceler l'HVG chez des patients souffrant de bloc de branche gauche que chez le reste de la population.
Dans ce cas... Comment diagnostiquer l'HVG en présence de bloc de branche ?
Hypertrophie ventriculaire gauche et bloc de branche droit
Le bloc de branche droit altère complètement les indices de voltage, c'est pourquoi ils sont invalides chez les patients concernés. On peut soupçonner la présence d'une hypertrophie ventriculaire gauche dès lors qu'on observe une hypertrophie auriculaire gauche sans autre pathologie associée, c'est-à-dire la présence d'ondes P larges (mitrales) sur les dérivations inférieures ou une prédominance d'ondes P négatives sur V1 3 4.
Si l'on soupçonne fortement la présence d'une HVG, il faut réaliser un échocardiogramme.
Hypertrophie ventriculaire gauche et bloc de branche gauche
Le risque de présence d'une hypertrophie ventriculaire gauche est plus grand chez les patients souffrant de bloc de branche gauche, c'est pourquoi il est important de pouvoir la diagnostiquer par électrocardiogramme.
Certains chercheurs ont démontré que les indices de voltage sont aussi valides dans le cadre de cette pathologie que chez les patients présentant des complexes QRS inférieurs à 120 ms.
La présence d'indices révélant une hypertrophie auriculaire gauche augmenterait le risque diagnostic 3 6.
Références
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