Hypertrophie auriculaire gauche et son électrocardiogramme
Le passage du stimulus électrique à travers les oreillettes se reflète sur l'électrocardiogramme sous la forme de l'onde P.
Une onde P normale mesure moins de 2,5 mm (0,25 mV) de hauteur et moins de 0,12 s de longitude (3 petits carreaux).
Par ailleurs, elle est formée de deux composantes, une composante initiale où l'on observe la dépolarisation de l'oreillette droite et une composante finale engendrée par la dépolarisation de l'oreillette gauche.
Cette différence est la plus significative sur la dérivation V1 où l'onde P présente une morphologie biphasique, avec une première portion positive (oreillette droite) et une seconde portion négative (oreillette gauche) 1.
Hypertrophie auriculaire gauche et électrocardiogramme
Il va de soi que l'hypertrophie auriculaire gauche provoque, dans la plupart des cas, des altérations de l'onde P et particulièrement dans sa composante finale.
Comme l'oreillette gauche se dépolarise après l'oreillette droite, une dilatation de cette dernière provoquera un allongement du temps de dépolarisation et, par conséquent, un élargissement de l'onde P, supérieur à 0,12 s.
Dans certains cas, les composantes droite et gauche de l'onde P se séparent légèrement, donnant à l'onde P une forme de lettre «m» minuscule, typiquement appelée onde P mitrale.
Hypertrophie auriculaire gauche :
Onde P supérieure à 0,12 s présentant la forme d'une lettre m (flèche rouge).
D'autre part, sur la dérivation V1, la profondeur de la composante finale négative est supérieure à la hauteur de la portion initiale.
En résumé : le signe le plus significatif d'une l'hypertrophie auriculaire gauche est la présence d'une onde P large supérieure à 0,12 s ou à 3 petits carreaux, avec une prédominance de la portion finale négative sur V1.
Hypertrophie auriculaire gauche :
Onde P large dont la partie négative est plus large et plus profonde.
Il est important de noter qu'on peut observer chez les patients souffrant de cardiopathie ischémique des ondes P larges associées à une oreillette gauche aux dimensions normales, sans doute dû à un ralentissement de la conduction auriculaire.
La présence de signes électrocardiographiques propres à l'hypertrophie auriculaire gauche fait partie des critères retenus dans le diagnostic de l'hypertrophie ventriculaire gauche (HVG).
C'est d'ailleurs un des rares signes d'HVG détectables sur l'ECG chez les patients souffrant de bloc de branche droit complet (voir hypertrophie ventriculaire gauche).
Causes de l'hypertrophie auriculaire gauche
A lui seul, le vieillissement peut provoquer une hypertrophie ventriculaire gauche, sans doute en relation avec des changements structurels dans le tissu auriculaire.
On a également relié l'obésité à l'hypertrophie auriculaire gauche, bien que le mécanisme qui les relie ne soit pas élucidé 2.
L'hypertrophie ventriculaire gauche est clairement reliée à l'hypertrophie auriculaire gauche. Aussi, les causes qui pourraient être à l'origine d'une HVG, telles que l'hypertension artérielle, la sténose aortique ou une cardiomyopathie hypertrophique, peuvent provoquer une dilatation de l'oreillette gauche 2 3.
Les altérations de la valvule mitrale, c'est-à-dire la sténose mitrale, par augmentation de la pression, comme l'insuffisance mitrale, par augmentation du volume, sont les causes classiques de l'hypertrophie auriculaire gauche.
L'insuffisance aortique génère une surcharge des cavités gauches, donnant lieu à la dilatation auriculaire et ventriculaire gauche.
La fibrillation auriculaire est à la fois cause et conséquence de la dilatation de l'oreillette gauche, bien que sa présence sur un ECG empêche de détecter les signes de l'hypertrophie auriculaire gauche du fait de l'absence d'onde P 4.
Causes de l'hypertrophie auriculaire gauche
Hypertrophie auriculaire gauche et les bloc interatriaux
Le tracé du bloc inter-atrial présente un élargissement de l'onde P qui est généralement bimodale, ce qui amène souvent à l'interpréter comme un signe d'hypertrophie auriculaire gauche alors que ces deux tracés électrocardiographiques sont deux entités distinctes 5.
Dans ce cas-là, c'est la morphologie de l'onde P sur la dérivation V1 qui permet de déterminer s'il existe une hypertrophie auriculaire gauche associée au bloc inter-atrial.
La présence d'une portion finale négative supérieure à 40 ms de l'onde P sur la dérivation V1 favorise le diagnostic de l'hypertrophie auriculaire gauche 5.
En tous les cas, l'association d'un bloc inter-atrial et d'une hypertrophie auriculaire gauche est relativement fréquente. De fait, on a considéré que l'onde P bimodale s'expliquait davantage par la présence d'un bloc inter-atrial sous-jacent que par la distance que l'impulsion doit traverser 6.
Références
- 1. Surawicz B, Knilans TK. Chou’s electrocardiography in clinical practice, 6th ed. Philadelphia: Elservier; 2008.
- 2. Edhouse J, Thakur RK, Khalil JM. Conditions affecting the left side of the heart. BMJ 2002;324:1264. doi: 10.1136/bmj.324.7348.1264.
- 3. Vaziri SM, Larson MG, Lauer MS, et al. Influence of Blood Pressure on Left Atrial Size. The Framingham Heart Study. Hypertension. 1995; 25: 1155-1160. doi: 10.1161/01.hyp.25.6.1155.
- 4. Bombelli M, Facchetti R, Cuspidi C et al. Prognostic Significance of Left Atrial Enlargement in a General Population. Results of the PAMELA Study. Hypertension. 2014; 64: 1205-1211. doi: 10.1161/HYPERTENSIONAHA.114.03975.
- 5. Bayés de Luna A, Platonov P, et al. Interatrial blocks. A separate entity from left atrial enlargement: a consensus report. J Electrocardiol. 2012 Sep;45(5):445-51. doi: 10.1016/j.jelectrocard.2012.06.029.
- 6. Diego Conde D, Seoane L, et al. Bayés’syndrome: the association between interatrial block and supraventricular arrhythmias. Expert Rev. Cardiovasc. Ther. 13(5), 541–550 (2015). doi: 10.1586/14779072.2015.1037283.
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